
BIOGRAPHIE
Tout petit déjà, il grandissait à vue d’oeil. Sans s’arrêter à cette performance physique somme toute assez banale, à quatre cinq ans, bien avant de rentrer à l’école où l’on apprend à lire, assis à l’arrière de la voiture familiale, il lisait les publicités et les noms des villages sur les panneaux routiers. Serait ce en ces moments d’apprentissage autodidacte que son langage s’est construit de formes et de couleurs ? Qui sait ?
Après ces performances scolaires, voilà qu’à sept huit ans, viennent les performances sportives. En fait, plutôt théâtrales que sportives… Lors d’un grand tournoi international de football, son équipe perd le match. Chacun aurait pu rentrer dans ses pénates, tête basse. Eh bien non, son désarroi touchant irradia le public et transforma cette défaite en une enivrante joie partagée de la foule le portant en triomphe sur ses épaules joyeuses. Sûrement là sa première mise en scène. Tout aussi épique que le France/Allemagne 82 à Séville.
De fait, il était davantage théâtre que sport, plutôt metteur en scène que butteur. Il n’était d’ailleurs pas le dernier à participer joyeusement aux petites pièces de théâtre jouées entre cousins devant sa famille. Piécettes où les grands s’arrogeaient les premiers rôles et lui laissaient généreusement les seconds, que déjà il incarnait avec malice et énergie. Aussi il régalera encore sa famille quelques années plus tard avec sa reprise du sketch « Mon chien, c’est quelqu’un » de Raymond Devos. Après la mise en scène footballistique, voilà qu’il devient comédien.
Il découvre les grands auteurs au Lycée « Pierre de Fermat » à Toulouse, dont il intègre bien sûr l’atelier « théâtre ». Période où il noue de belles amitiés entre jeunes artistes en herbe, où son esprit et son corps se nourrissent dans les joies du jeu, de la découverte et du partage. Puis, le bac en poche, il préfère les planches aux bancs de la fac. Son activité théâtrale devient alors prolifique. Il monte en famille Exercices de style de Queneau, joue Tchekov. Puis il monte avec son ami Franck Soubielle la Compagnie Goliadkine avec qui il met en scène Souviens toi Prévert, Macbett de Ionesco, il joue le premier rôle Sémione Sémionovitch dans Le Suicidé de Nikolaï Erdman, il joue et met en scène Dans la solitude des champs de coton de Bernard Marie Koltes. Que de belles aventures collectives joyeuses et émancipatrices !!!
Fort de ces diverses expériences il intégrera les cours de théâtre de la Compagnie 3BC à Toulouse, où il passera tout son temps à se nourrir de théâtre, de littérature, de poésie et de pâtes Carbonara entre camarades tous aussi joyeux les uns que les autres.

Après trois années de formation aussi passionnée qu’acharnée, il intègre une troupe professionnelle avec qui il joue entre autres, dans Meurtres de la princesse juive d’Armando Llamas mis en scène par Jean Marc Brisset.
Il était beau, riche d’une culture littéraire étoffée, drôle, créatif, percutant, entraînant, gentil, et si bienveillant. Les filles ne s’y trompaient pas, il était aimé par des jeunes femmes tout aussi séduisantes que lui.
Puis patatras !!! Sa créativité insatiable, sa sensibilité exacerbée seront percutées de doutes, de sentiments contradictoires, de questions délirantes, de souffrances existentielles qui lui feront perdre pied. De longues années de bataille, brutales, cruelles, violentes s’enchaîneront.
Le travail théâtral en troupe s’arrêtera et pourtant, il continuera d’écrire. Théâtre, poésie, aphorismes, fictions. En solitaire, des milliers de pages manuscrites s’entasseront dans ses appartements respectifs.
Son pouvoir créatif l’aide à reprendre pied dans la cité. C’en était fini du théâtre, disait-il, c’était maintenant la peinture. Il dessine, peint, expérimente plusieurs techniques jusqu’à inventer la sienne propre, une drôle de technique : des tableaux construits de formes et de couleurs, prédéfinies par ses soins, qu’il agence avec passion pour créer des œuvres originales sous le nom de Basto. Sa peinture trace ses chemins entre fragmentations et proliférations.
Dans les années 2010, il continue d’écrire, de peindre, ses productions picturales s’exposent tout autour de Toulouse. Elles interpellent, séduisent…
Il décidera de quitter la vie le 9 août 2022.
Aphorisme n°19
Si Dieu avait été épaulé
Il aurait pas fait la mort
C’est vraiment passé à ça !
Aphorisme n°20
Je suis mortel. Et alors ?
Aphorisme n°21
Sans Dieu, je n’existerai pas.
Quel dommage !
Aphorisme n°22
Je fais tout comme Dieu. Ou l’inverse ?
Bref, comme lui, j’aime pas trop la salade.
Aphorisme n°38
Avant moi, Dieu
Après moi, Dieu
Heureusement que j’étais là !
” La salade primordiale” de Basto, 2022